Les Français seraient-ils vaccinés contre le virus des soldes d’hiver ?

La crise sanitaire n’est-elle qu’un mauvais moment à passer avant le retour à la normale ou bien agit-elle comme le révélateur et l'accélérateur d’un désenchantement déjà à l'œuvre ?

La crise sanitaire appuie là où ça fait déjà mal

Bilan mitigé, fréquentation en baisse, ambiance morose… : depuis quelques années les soldes d’hiver ne sont plus la grande fête commerciale qu’ils étaient jadis, la kermesse des bonnes affaires qui venait rituellement clore en beauté la saison d’hiver et annoncer la très attendue collection de printemps. La crise sanitaire et son cortège de mesures restrictives sont passés par là et ont brutalement confirmé une tendance que les commerçants pouvaient encore croire réversible : dans le secteur de la mode, le CA en boutique du premier jour des soldes 2021 a chuté de 33% par rapport à 2020, celui de la première semaine de 34%, et, si l’on compare, les deux premières semaines des soldes de 2021 à celles de 2020, on constate que le volume des ventes a baissé de 29%.

(base 100 = jan 2020) période du 08/01/2020 au 04/02/2020 et période du 20/01/2021 au 03/02/2020

Même constat, dans une moindre mesure, pour le e-commerce, avec un CA des soldes en ligne qui a baissé de 19% sur le premier jour par rapport à 2020, et de 14% sur la semaine.

(base 100 = jan 2020) période du 08/01/2020 au 04/02/2020 et période du 20/01/2021 au 03/02/2020

Attention à la prolifération des variants !

Autre chiffre significatif : le Black Friday 2020 a fait nettement mieux que les soldes d’hiver, avec un CA supérieur de 29% sur la semaine pour les ventes mode en boutique et de 46% pour les ventes en ligne. Est-ce à dire que le variant américain est en train de durablement détrôner la souche française ? Sans doute, d’autant plus que l’attente de ce Noël 2020 très incertain est plus que jamais venue cristalliser la soif de consommation festive des Français.

Plus globalement, la récurrence des opérations commerciales (promotions, destockages, offres spéciales, ventes privées…) associée à l’essor du marché de seconde main, en magasin et en ligne, tend à modifier en profondeur les comportements d’achats : chez les Français shootés aux prix cassés, les poussées compulsives de fièvre acheteuse concentrées sur les périodes classiques de soldes semblent céder la place à des conduites plus addictives (et solitaires) de quête au long cours du meilleur prix.

Le chemin de la résilience passe par le e-commerce

Si l’on étudie maintenant les chiffres des soldes de Darty et la FNAC, en boutique et en ligne, on constate un véritable retournement par rapport à 2020 : sur les deux premières semaines de soldes, les ventes en magasin de Darty ont baissé de 9% et les ventes en ligne ont fait un bond de + 43% ; pour la FNAC, les ventes en magasin ont baissé de 25%, les ventes en ligne ont augmenté de 24%.

Quant aux grandes plateformes de e-commerce, après une première semaine de soldes une laborieuse, en retrait par rapport à 2020, elles ont bien rattrapé leur retard en deuxième semaine et finalement fait mieux qu’en 2020, sans doute à coups de démarques très agressives.  

Le e-commerce est donc bien le grand gagnant de la crise (et heureusement qu’il y en a un !), mais il est aussi le moteur de la résilience, le pompier d’une situation pour le moins critique.

Conclusion

La bouffée d’oxygène tant attendue par les commerçants en ce début d’année aura donc été insuffisante pour compenser la mise en coma artificiel de 2020. Reste à espérer que l’assistance respiratoire prodiguée par le Gouvernement leur permette de sortir à peu près indemnes de cette interminable crise sanitaire. Il sera alors impératif d’adapter le vieux modèle des soldes saisonnières à la nouvelle donne socio-économique et aux nouvelles attentes des consommateurs.


Méthodologie

Les données de cet article sont basées sur l’analyse des achats effectués par carte en France auprès des enseignes étudiées jusqu’au 10/02/2021. Elles sont anonymisées et proviennent uniquement des cartes “principales” des consommateurs inscrits sur les programmes de nos partenaires (banques, fintechs, compagnies d'assurance et programmes de récompenses).